vendredi 12 mai 2017

19. ETHIOPIE


Une centaine de kilomètre avant la frontière, quelques collines rocheuses et d'un seul coup on quitte le Maghreb pour rentrer  véritablement en Afrique. Ça et là les premières cases avec leur toit de chaume. La température grimpe vertigineusement. Les choses sérieuses commencent vraiment à partir de là.



Quelques visages d'enfants au gré des haltes et des rencontres


Enfin l'arrivée tant attendue dans les monts Simei dont j'ai tant rêvé depuis que j'ai ce projet africain c'est à dire depuis plus de 10 ans maintenant. C’est spectaculaire et grandiose! Pour nous rendre à la réserve naturelle du Silmei nous devons prendre une piste de caillasses pendant une vingtaine de km.



Tout le monde s'en sort bien. Ne nous reste plus qu'à admirer. Puis la route continue et je passe à quelques km de la frontière avec l’Érythrée. En fait je devrais parler de ligne de front puisque les 2 pays sont en état de guerre depuis des années : les contacts se font épisodiquement à coup de mortiers de 15 pouce voire de canons de 30 mm. L’Érythrée était autrefois une province éthiopienne, qui avait l'avantage de lui offrir un accès à la mer. Les choses ont commencées à se compliquer quand les érythréens, pratiquement tous musulmans, ont souhaité prendre leur indépendance. La fâcherie qui s'en est suivie à fait quelques dizaine de milliers de morts.


Maintenant les choses se complique un peu pour moi depuis quelques jours, précisément depuis la fameuse nuit de camping. La fatigue est là, bien présente. J'ai perdu/cassé mes 2 paires de lunettes, perdu le câble de mon iPhone que je ne peux plus recharger, perdu ou oublié dans les hôtels une quantité d'objet pourtant bien nécessaire et pour finir je traîne un rhume terrible qui m’empêche de dormir et m’épuise. En plus je traîne une mauvaise grippe depuis le soir du fameux camping. Si cela s’avérait nécessaire, je consulterai un médecin à Addis Abeba dans quelques jours. C'est vraiment dommage car cela m’empêche bien de profiter à 100 % de cette partie exceptionnelle de mon voyage.

Les rues de beaucoup de villages traversées sont souvent jonchées de piles de bois que les habitants proposent à la vente. Drame de l'Afrique en cruel manque de source d’énergie pour les besoins basiques du foyers. Déforestation terrible du Sénégal à l'Ethiopie.


Lundi 6 Février

En suivant la carte vous vous êtes aperçu que depuis quelques jours et depuis Gonder, je fais le tour complet des monts Simei avec des étapes à Axum, Mekele et Weldiya.

Quelques photos d'épisodes de ces derniers jours.

Les accidents de tuc-tuc ça fait très très mal
Les éthiopiens adorent les courses de vélo
Jolie mariée à Mekele
Mischivious boy !
Pas rassuré l'auto-stoppeur !
Mardi 7 Février



Une journée sportive et exceptionnelle. Me voilà parti vers les montagnes sur les pistes caillouteuses des monts Simei. Le panorama est inouï, c'est magnifique. A chaque vallée des paysages différents. C'est à tomber de l'armoire.


Je ne sais pas comment je me suis arrangé mais me voilà tout seul, ballotté par les pierres et les trous de cette terrible piste. Je ne sais pas où sont mes camarades et je m'en moque complètement. Il y a bien quelques occasions où je me fais la peur de ma vie mais ça passe et ça passe plutôt bien. Un arrêt dans un village pour faire ma petite visite au curé qui se tient au bord de la route.

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J'ai 66 ans avec un "léger" historique médical derrière moi et je suis là en train de faire le guignole tout seul dans les montagnes éthiopiennes. Sans vouloir me la "péter" je suis quand même trop fier. Evidemment à l'arrivée je suis bien claqué et des ampoules plein les mains pour avoir serré si fort le guidon de la belle japonaise.

Plutôt amorti le papybiker! !
Mercredi 8 Février

Aujourd'hui est un jour spécial pour deux raisons. D'abord c'est l'anniversaire de ma Klara et je regrette bien de ne pas bien de ne pas être auprès d'elle pour l'embrasser. Pour l'autre raison, il faut que je revienne en arrière de 55 ans environ. Pour un Noël ou un anniversaire mes parents m'avaient offert un atlas du monde avec des illustrations à chaque page. Cela me passionnait beaucoup plus de me plonger dans mon atlas que d'apprendre mes leçons. Pour l’Amérique du nord il y avait un dessin avec des indiens, pour l'Italie la tour de Pise et pour l'Afrique, il y avait une église creusée dans le sol avec à l'entrée un prêtre enturbannée de blanc et vêtu d'un genre de sarong blanc également. Dieu sait que ce dessin m'avait fait rêvé ! Cet endroit s'appelait Lalibela et vous aurez deviné que c'est précisément là que je suis arrivé hier au soir. Aujourd’hui je suis devant cette église, très ému et je passe un bon moment avec un prêtre qui est lui habillé de jaune. Quelle émotion incroyable !


Puis j'ai la chance d'assister à une cérémonie à laquelle je ne comprends rien mais qui est très recueillie et magnifique. Il s'agit de l'Eglise Orthodoxe d'Ethiopie avec un rite très ancien qui n'a pas du recevoir beaucoup d'influences externes. J'aimerai en savoir plus.


L'après-midi, je décide d'aller à l’hôpital local car à la suite de la grippe d'il y a quelques jours, je souffre d'un point un peu douloureux au fond du palais. C'est assez pénible et handicapant. En attendant mon tour dans cet hôpital, j'en apprends plus sur l'Ethiopie que dans tous les livres que j'aurai pu lire sur le sujet. Bref je ressors avec des antibiotiques. Je fais une intense prière pour que cela marche. Sinon ??????


En toutes circonstances essayons de garder un peu d'humour, aidé en cela par les devantures de quelques magasins locaux.

C'est Trump qui va être content !
Carrefour ?
Un magnifique jacaranda 
Dimanche 12 Décembre 

Il est clair que depuis ma dernière tentative, je me suis quand même pas mal amélioré: pensez, en 2014, j'avais fais 2 pays et tenu 4 jours avant de finir à l’hôpital. Cette fois j'en suis au troisième pays au bout de quelques 18 jours de voyage. Tous les espoirs sont permis. Peut être que je réussirai à conduire une moto d'une manière convenable une fois centenaire !

Depuis Lalibela, pour rejoindre Addis Abeba, nous faisons un gros détour par le lac Tana alimenté par un certain nombre de rivières mais dont on dit que c'est la vrai source du Nil Bleu que nous avions déjà vu à Khartoum à sa jonction avec le Nil Blanc. Une épave de blindé pour décorer le jardin d'un hôtel d'une étape. Drôle d'idée!


La mauvaise piste que nous avons prise pour quitter Lalibela pendant 80 km a été fatale à Cindy (l’australienne) qui s'est fracturée la jambe au volant de sa moto. La pauvre fille a été complètement secouée car évidement la suite de son voyage parait bien compromis. Je connais le problème à fond. Après la pause d'un plâtre, finalement elle pense qu'elle va pouvoir remonter sur son engin dans 15 jours. Elle rêve ! Cela pose un problème car sa moto est maintenant sur le camion et aucun des restants n'a droit à l'erreur, pas d'accidents, de panne, de coup de pompe : il n'y a plus de place sur le camion pour une deuxième moto. Dans d'autres circonstances, on aurait renvoyé le blessé dans ses foyers ainsi que la moto afin que le voyage puisse se poursuivre dans des conditions normales pour le reste de l'équipe: c'est la règle du jeu. 


Je trouve que certains participants sont carrément trop justes au niveau des compétences et expérience pour ce genre de voyage en général et surtout pour traverser l'Afrique en particulier. Je trouve également que certaines motos ne sont absolument pas adaptées à une traversée d'Afrique. Comme par hasard, c'est elles qui tombent en panne et qui retardent tout le monde.




Bref le voyage continue à travers le pays dans les plateaux fertiles coupés par des canyons vertigineux spectaculaires. De temps à autres des groupes de babouins font la quête le long de la route. Ils n'ont pas l'air trop sympa !


Sur la route d'Addis

A deux doigts de la panne sèche !

Puis c'est l'arrivée à Addis Abeba, le cœur plein de fierté. Qui aurait pu penser il y a 1 an que je puisse entreprendre ce projet et en accomplir maintenant un peu plus du tiers. Je suis ravi, aux anges. 
Les petits problèmes de santé de la semaine dernière sont maintenant pratiquement résolus grâce aux excellents soins prodigués à l’hôpital de Lalibela, le système digestif connait une certaine stabilisation et le reste, bon le reste on verra à mon retour. 

J'étais déjà venu en Ethiopie en permission lors de mon service militaire en 1973 ou 74. Après avoir pris le train jusqu'à Dire Dawa à l'est du pays, j'étais monté jusqu'à la ville du Harare, ville extraordinaire, sur les traces d'Arthur Rimbaud qui y a fait quelques trafics d'armes à la fin du 19e siècle et surtout de ce chenapan d'Henry de Monfreid dont les livres d'aventures, les Secrets de la Mer Rouge,  La Croisière du Haschish, etc . . . ont bercés mon adolescence et pour lequel j'ai toujours eu une grande affection.

Addis Abeba , 20 million d'habitants, capital d'un pays de 100 millions d’éthiopiens, une puissance régionale importante. Auto suffisance alimentaire, le taux de croissance économique le plus élevé d'Afrique, le siège de l'Union Africaine. Un potentiel touristique considérable. L'avenir est prometteur pour l'Ethiopie !

Lucy comme elle était
Cette pauvre Lucy



Une journée de repos donc à Addis dont je profite comme d'habitude pour faire ma lessive, vérifier la moto et faire une sieste d'anthologie. Je file au Musée National pour rendre visite à mon aïeule d'il y a  3 millions d 'années, Lucy, dont personnellement je pense que c'était tout simplement le lien manquant entre le  chimpanzé et l'homme. Visite néanmoins très intéressante.

Demain grand départ vers le Kenya que je rejoindrai en 2 jours de voyage.

La sortie d'Addis Abbeba est épouvantable, une circulation abominable , des routes inexistantes, une file de camion det de bus camions et des bus interminables, des fumées d'échapement, une pollution terrible. A l'étape un singe est très intéressé par ma moto.


Après 200 km, il n'y a plus de route en tant que telles, le passage est complètement défoncé, pendant 300km. A l'arrivée de l'étape, pas de douche mais une toilette de chat est malgré tout indispensable.


Je retrouve sans surprise une succursale que j'avais installé il y a des années de cela . Les affaires ne semblent pas florissantes.


L'ambiance change complètement. A chaque village traversé ce sont des cris, des hurlements. Les visages sont fermés, les regards hostiles. Un jeune me fait un signe en travers du cou (dit le sourire kabyle) qui me donne à penser que ce n'est pas le moment de tomber en panne sinon je vais passer un mauvais quart d'heure. Nous sommes revenu en terre d'Islam et cela se voit à la tenus des femmes. 

La première termitière, quelques francolins qui picorent le matin au bord de la piste. Un paysage de plaines immenses  boisées d'acacias en coupole : nous voilà déjà en Kenya. Pas mécontent de quitter le sud éthiopien.


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